Le vertige de l’Infini

Charles Maze, le photographe qui vole de plus en plus haut et qui, comme un oiseau, nous regarde de loin. Il virevolte, il scrute, il tourne dans ses rondes imaginaires. Notre oeil le suit et se laisse hypnotiser, envelopper par le temps et l’espace qui n’existent plus, car transformés en desseins et en formes abstraites qui inspirent le regard et l’invitent à rêver.
Si on interrogeait une sphère de cristal pour dévisager le futur, nous y verrions surgir les énigmatiques images de Charles Maze. Ici, le monde est à l’envers, sans dessous, sans dessus, il est seulement totalité, absolue.
Evoquant les labyrinthes que jadis le pèlerin parcourait pour purifier son esprit, un pas après l’autre, dans les spirales cathartiques gravées sur le sol marbré des cathédrales gothiques, les spirales bénévoles que Charles Maze appelle ses Anamorphoses envoûtent les spectateurs en lui faisant traverser leurs volutes visionnaires. 
On y cherche un chemin, un visage, un trait reconnaissable, jusqu’à se laisser transporter vers ces dédales de couleurs et sensations que Charles crée à travers ses représentations. Un voyage dans l’iris oculaire, vers la profondeur du regard, là-bas où tout se mélange, se fond, se confond. Une danse circulaire, presque un rituel apotropaïque, qui convoite villes et paysages, lumières et ombres, silhouettes inconnues, étranges filaments qui ne se révèlent que plus tard à la compréhension : ce sont des ponts, des réverbères, des routes, des escaliers, des êtres humains changés en fragments, en taches de couleurs, en touches de vie, immobiles dans cet univers silencieux, circulaire.
Kaléidoscopiques reliques de songes, les Anamorphoses de Charles sont des amulettes aux tonalités lunaires, des pierres précieuses sectionnées à l’intérieur pour dévoiler leurs âmes faites de rayons et de stries, lézardées par toutes les nuances de la nature : élixir du regard.
Charles nous plonge au fond du puits et nous fait découvrir un nouveau monde. Il n’y pas de noir, ni d’ombre, tout n’est que lumière pure qui joue avec la réalité pour rendre à la vie son aspect merveilleux. Pour rendre à l’homme l’essence d’une vision sans logique mais stupéfiant telle l’existence et les cycles naturels où tout change et tout se répète à jamais.
En regardant les villes, les horizons marins, les ciels et les montagnes circulaires dévoilées par Charles Maze, un frisson parcourt ma pensée : dans ses images on perçoit l’éternel retour des serpentines spires du temps, l’idée d’un espace où tout s’unifie et se déforme, où tout s’enfouit dans une immensité close pour nous donner un enivrant vertige de l’Infini.
Alba Romano Pace
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